Essayons d’y voir plus clair sur les règles liées au télétravail
Combien de jours de télétravail par semaine ?
« Combien de jours de télétravail par semaine ? ». Pour tous ceux qui peuvent travailler à distance, voilà la question qui, à l’occasion de la crise sanitaire, marque une véritable rupture dans l’organisation du travail apportée par la crise sanitaire.
En pratique, la réponse pourrait s’arrêter à un nombre, la durée hebdomadaire de jours de travail à distance. Mais le mode d’application de la mesure amène une multitude d’autres questions :
- L’entreprise doit-elle imposer un nombre de jours ou juste le recommander ?
- Parle-t-on de d’une durée minimale ou maximale en télétravail ?
- S’agit-il de travail à domicile ou de travail aménagé dans espaces de coworking?
- Doit-elle être appliquée à la main des managers de chaque service ou de manière indifférenciée ?
- Le nombre doit-il être défini sur une échelle hebdomadaire ou annuelle ?
Pour tenter d’y voir plus clair, distinguons quatre angles d’analyse.
Pour le bien-être, la règle c’est la flexibilité
Le premier a trait au bien-être au travail du collaborateur. Et là un principe s’impose : la flexibilité. En effet, comment pourrait-on imposer une organisation du travail uniforme à des collaborateurs qui bénéficient de conditions de travail très différentes chez eux ou qui ont simplement des aspirations différentes les uns des autres ? De même comment imaginer qu’un jeune diplômé doive travailler isolé dans sa chambre d’étudiant pendant sa phase d’intégration dans l’entreprise ? Donc, du point de vue du collaborateur, le principe du libre-choix laissé à chacun semble évident. Pour aller plus loin, l’entreprise doit même aider ses salariés à créer les meilleures conditions de travail chez eux s’ils le souhaitent.
Côté coûts, il faudrait imposer le télétravail
Les coûts pour l’entreprise, pour le salarié, pour la collectivité et l’effet sur l’environnement constituent une seconde grille d’analyse. Là aussi les choses sont claires : le télétravail devrait être imposé tous les jours ! Gains de surface des locaux de l’entreprise, économies de frais de transport pour le salarié et impact positif pour la planète. Tout cela dépasse de loin les surcoûts liés à l’utilisation plus intense d’échanges digitalisés. En outre, le télétravail rend possible l’embauche de talents loin d’un bureau donné pour autant que le décalage horaire est limité : cela offre potentiellement un fantastique enrichissement de son capital humain.
Pour l’efficacité, ça dépend
Concernant l’efficacité de ce mode de travail, il ne peut y avoir de réponse aussi tranchée. Les activités de création collective ou les négociations seraient peu compatibles avec du télétravail. Inversement des réunions opérationnelles quotidiennes gagneraient beaucoup en préparation, en rigueur d’animation et en respect des horaires en les tenant à distance. Sans oublier une journée de travail peut compter bien plus de réunions à distance qu’en présentiel. Donc, c’est la nature d’une réunion qui déterminerait son mode de tenue – à distance ou en personne. Dans tous les cas, le conditionnel s’impose, car personne ne dispose de faits solidement établis pour avoir une opinion définitive et l’empirisme fait loi. Deux certitudes toutefois qui s’opposent. Pour les défenseurs du télétravail, nous devrions être capables de trouver à terme les outils et méthodes qui nous permettront même à distance de retrouver l’efficacité des réunions en présentiel quelle que soit la nature de la réunion. Pour les autres, si les échanges avec ses interlocuteurs habituels se limitent à une succession de réunions à distance, il n’y a plus de place à l’imprévu, à la discussion improvisée à la machine à café et nous savons tous que bien des idées sont nées dans ces échanges spontanés.
Le télétravail ne favorise pas l’attachement à l’entreprise
Enfin, se pose la question de l’attachement à l’entreprise. Nous entrons là dans le monde de l’alchimie fine. De tous les éléments qui constituent l’engagement d’un collaborateur (le sens du travail, la reconnaissance, l’intensité, l’environnement de travail…) le lien social avec ses pairs ou avec ses managers est essentiel. Est-ce que ce lien peut se constituer au travers d’écrans d’ordinateurs ? Nous sommes sans doute tentés de répondre que non ; que des moments précieux d’émotion collective, d’imprévus partagés, de regards, de sourires tissent le lien social une culture d’entreprise et l’envie de travailler ensemble. En outre, le bureau est un élément constitutif de la personnalité d’une entreprise. La Ruche au siège de Renault, Challenger pour Bouygues Construction, l’architecture d’Omega au siège d’Alstom sont l’expression concrète de leur culture. La présence physique des collaborateurs dans des locaux aussi symboliques est indispensable au partage d’une culture commune.
Alors, que faire ?
Entre conclusions contradictoires et aveux d’incertitude, il n’est pas facile pour les accords d’entreprise de s’appuyer sur des éléments consensuels et pour les employeurs de définir une ligne de conduite. A ce stade voici ce que serait la mienne :
- D’une manière générale, la flexibilité responsable doit être privilégiée. Il incombe au collaborateur de choisir le meilleur compromis entre efficacité et bien-être. A lui de définir son lieu de travail en fonction des réunions à tenir en présentiel et de ses propres conditions de travail. Cela nécessite sans doute de mieux former les managers à la gestion des hommes et d’adapter le code du travail qui fait du temps de travail la clef de voute de la relation salarié-employeur– mais c’est une autre histoire.
- Les outils et les méthodes permettant de travailler plus efficacement à distance doivent être recherchées, évaluées, mises en œuvre et améliorées constamment
- Apprenons à échanger, discuter, créer collectivement à distance : la réunion virtuelle doit devenir la situation par défaut.
- Le télétravail ne doit pas être imposé à l’exclusion des périodes d’obligations sanitaires. La présence au bureau peut, elle, être imposée en lien avec des activités planifiables.
- Imposons la présence physique à certaines réunions exceptionnelles. Exceptionnelles parce qu’elles ne sont plus la norme et parce que les sujets traités ou les endroits où elles se déroulent sont exceptionnels.
- Les réunions physiques obligatoires et planifiées seront tenues autant que possible durant les mêmes jours d’une semaine pour permettre aux collaborateurs qui préfèrent le télétravail de s’organiser en conséquence.
- Les réunions hybrides sont autant que possible à éviter. Les réunions sont plus faciles à animer quand tous les participants partagent le même mode – en personne ou à distance.
- La décision de tenir une réunion à distance ou en présentiel revient à celui qui l’organise ou à un manager.
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