La récente organisation d’un benchmark entre une quinzaine de grandes entreprises sur le salaire des acheteurs a révélé des points d’intérêt et soulevé quelques questions.
Le benchmark a consisté à comparer le salaire fixe moyen d’un acheteur dans la région parisienne pour 4 profils : en tout début de carrière, expérimenté après 10 ans, manager et N-1 du directeur achats groupe. La comparaison a également porté sur la partie variable, les autres éléments de la rémunération et les variations entre pays.
Des tendances communes aux différentes entreprises
Premier constat, les écarts entre entreprises de salaire entre le plus fort salaire proposé et le plus faible augmente de manière importante avec la séniorité de la position en intégrant la partie variable. Il se limite à 20% en début de carrière et approche 90% pour les N-1 du directeur achats. Dans cette dernière position, les salaires les plus élevés sont offerts par de grandes sociétés industrielles fortement internationales. Cela ne vaut pas pour les plus juniors.
Deuxième constat, la part du variable croit considérablement avec l’évolution dans la hiérarchie. Faible pour les juniors (5 à 10%) il se monte en moyenne à plus de 25% du fixe pour les plus seniors. Pour les salariés français, l’intéressement et la participation est une composante importante en début de carrière.
A noter que le variable repose pour les 2/3 sur des performances collectives – sur des critères quantitatifs (typiquement les économies reconnues comme impactant le résultat de l’entreprise) et qualitatifs. Le variable d’un directeur achats est directement lié au résultat de l’entreprise.
Autre élément remarquable, le salaire des acheteurs est maintenant bien aligné avec celui des autres fonctions de l’entreprise, hormis sans doute avec celui des commerciaux dont la partie variable est plus importante et peut induire des écarts importants au total. Cet alignement facilite la « respiration » de la Fonction Achats : on y entre et on en sort sans que le niveau de salaire constitue un handicap.
Toutefois, devenir expert dans la gestion d’une catégorie d’achat au fil des années sans assumer un management d’équipe autorise une bonne évolution salariale mais peut rendre plus difficile une évolution vers d’autres fonctions de l’entreprise.
Le benchmark n’a pas révélé d’écarts significatifs entre acheteurs suivant les catégories d’achats hormis peut-être pour de nouvelles catégories comme celles liées au digital ou l’achat de logiciels pour lesquelles le marché de l’emploi semble tendu.
Pourquoi les grandes entreprises paient mieux leurs acheteurs que les autres?
Les chiffres de salaires fournis par ces grandes entreprises se révèlent supérieurs à ceux rapportés par l’étude sur les salaires réalisée par Michael Page*. Cet écart se monte à 5 ou 10% en début de carrière. Il s’explique sans par la nature des échantillons de l’étude : de grandes entreprises d’un côté avec un CA moyen de 14 Mrds€ et une base plus large de l’autre incluant sans doute des ETI.
Le salaire des acheteurs ne fait que suivre là un phénomène général que rapporte une étude de la DARES de 2011 : les grandes entreprises paient significativement mieux leurs salariés que les autres. Il y a toutefois fort à parier que le phénomène est accentué dans la fonction achats par l’effet de levier que représente le volume. L’acheteur gérant une catégorie représentant 10M€ d’achats fera le même travail que l’acheteur gérant la même catégorie d’un montant de 1M€ dans une autre entreprise. Mais la valeur créée pour l’entreprise sera forcément bien supérieure. Il lui sera plus facile d’obtenir un salaire plus élevé suivant le célèbre principe qui veut que dans l’entreprise vous ne percevez pas le salaire que vous méritez mais celui que vous pouvez négocier. Les grandes entreprises arrivent à offrir des conditions de travail favorables, souvent induites par des conventions collectives généreuses, tout en demeurant plus productives que la moyenne.
Avant de courir envoyer votre CV à une grande entreprise, vous aurez toutefois à cœur d’y réfléchir à deux fois. La PME offre une variété d’activités, une rapidité d’exécution et des relations personnelles que les grandes entreprises ont du mal à garantir. Les plus jeunes s’y voient confier plus vite des responsabilités impensables dans une grande entreprise.
Il faut le rappeler, pour les acheteurs comme pour les autres employés, le salaire n’est pas l’élément le plus important du choix d’un job, surtout en début de carrière.
*L’étude de rémunérations 2020 de PageGroup ; https://www.michaelpage.fr