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FAUT-IL ETRE « PROCHE » DE SES FOURNISSEURS ?

By 5 March 2014December 17th, 2018No Comments

Comment créer une relation fructueuse avec ses fournisseurs sans créer une adhérence préjudiciable? Deux lignes directrices aident à définir la juste distance.

 

Une indispensable proximité avec ses fournisseurs…

L’excellent dossier sur l’innovation de la précédente Lettre des Achats est clair : pour bénéficier de l’innovation des fournisseurs il faut non seulement avoir une cadre bien défini des domaines sur lesquels cette innovation pourrait porter, mais aussi savoir créer des conditions favorables à une relation client – fournisseur étroite et fructueuse. Cela amène implicitement à nourrir de la confiance l’un pour l’autre. En effet parce que l’innovation ne peut être détaillée au départ aucun cadre contractuel suffit à assurer un co-développement réussi. Une connaissance intime des contraintes et objectifs respectifs constitue également le socle indispensable de la collaboration. Même avec un fournisseur dont on n’attend aucune innovation, l’entreprise peut gagner à chercher avec lui des moyens de baisser le coût de leur relation – par exemple en ajustant les supply chains ou en éliminant les coûts supportés par le fournisseur qui ne créent pas de valeur pour l’entreprise cliente. On voit bien que tout cela nécessite de développer une forme de proximité avec le fournisseur. C’est tout l’esprit des « écosystèmes » et autres pôles d’excellence pour lesquels une proximité géographique, ou au moins « culturelle », permet à l’ensemble de la filière de progresser.

 

… mais des craintes justifiées

Et pourtant, dans le monde des achats, la « proximité » effraie. Tout récemment, un dirigeant me disait être circonspect quand on lui parlait de proximité entre l’entreprise et ses fournisseurs : n’avait-on pas assez vu de ces connivences entre les prescripteurs et les fournisseurs qui interdisaient une saine mise en concurrence orchestrée par les acheteurs ? N’était-ce justement pas le rude travail de l’acheteur que d’objectiver la relation client-fournisseur, de gommer l’adhérence entre fournisseurs et prescripteurs ? N’était-ce justement pour éviter que leur lucidité ne soit pas polluée par toute forme d’attachement envers les fournisseurs qu’on s’efforçait de faire changer les acheteurs de portefeuille tous les 3 ou 4 ans?

 

Deux lignes directrices : une stratégie claire et une éthique incontestable

C’est tout l’art de l’acheteur de gérer cette apparente contradiction suivant deux axes directeurs : la stratégie de la catégorie d’une part et un comportement éthique d’autre part. La stratégie élaborée par l’acheteur pour la catégorie concernée détermine clairement dans quel cadre se situe la relation avec le fournisseur. La relation fournisseur ne nécessitera pas la même proximité pour une catégorie stratégique que pour une commodité sur un marché fournisseurs fragmenté. Mais même dans le second cas l’optimisation de la relation opérationnelle entre le fournisseur et l’acheteur ne peut se faire qu’avec un vrai dialogue qui sort du cadre de la simple négociation. Optimiser cette relation opérationnelle oblige d’ouvrir l’un à l’autre ses coûts, ses contraintes et ses intentions. Susciter cette confiance mutuelle, sachant que cette relation sera remise en concurrence n’est pas toujours simple.

 

La transparence de l’acheteur et son comportement éthique paraissent indispensables. Définir la distance juste au fournisseur requière donc de l’acheteur d’avoir une stratégie claire, de cultiver son sens des affaires (« business acumen »), d’agir avec discernement et d’avoir une éthique professionnelle irréprochable. Quel beau métier décidément !

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