Les startups deviennent un élément de transformation des grandes entreprises. Aux Achats de choisir l’étendue de leur contribution.
Les startups sont à l’honneur : ambassadeurs de la nation sous l’étendard de la French Tech, dynamiteurs des lourdeurs de la société, accélérateurs d’innovations pour les grandes entreprises, maîtres en « disruption ». Et que d’attentions pour les startuppers ! Ils peuvent venir au bureau en T-shirt, jouer au babyfoot aux heures de bureau, passer à la TV, parler d’égal à égal avec les patrons encostumés des grandes entreprises…
Quand le Petit Poucet aide Goliath
Au-delà du folklore, les startups deviennent progressivement un élément de transformation des grandes entreprises.
Qu’est-ce qui caractérise une startup ? C’est moins son âge et sa taille que son état d’esprit. Celui-ci tient à une forte instabilité : obligation de réaliser une forte croissance, technologie pas toujours mature, grand besoin d’argent et une position sur un marché encore mal connu avec un modèle d’affaire dont il est difficile de mesurer le risque. C’est un état temporaire, dans lequel tout peut changer – le marché comme le modèle d’affaire. En ce sens un Uber ou un Blablacar, en dépit de leur taille, sont encore des startups alors qu’un Facebook ne l’est plus parce que son modèle s’est stabilisé.
Les grandes entreprises voient bien tout le parti qu’elles peuvent tirer de relations suivies et structurées avec un écosystème de startups. D’un point de vue offensif, l’entreprise cherche toute innovation susceptible de lui apporter un avantage compétitif, par la différentiation ou la compétitivité. De manière plus défensive, il s’agit d’être attentif à ce qui pourrait remettre en cause son modèle d’affaire. A tort ou à raison, la grande entreprise attend de la startup des innovations plus radicales que de fournisseurs bien établis. Au-delà de ce qu’elle à vendre, une startup peut aussi apporter beaucoup de fraîcheur à ses clients en travaillant ensemble grâce à son obsession débridée du parcours client (ou UX pour user experience), une forte réactivité, une démarche basée davantage sur l’expérimentation que sur la réflexion conceptuelle, une manière de penser dépouillée du poids des solutions passées. C’est ce qui justifie la création de « labs », des structures dans lesquelles des collaborateurs de tous horizons planchent sur des projets innovants et se frottent à des startuppers pour avoir un regard différent sur leur approche.
Et les Achats dans tout cela ?
Les grandes entreprises ayant une démarche coordonnée vis-à-vis des startups organisent leurs actions sur trois axes : (1) les attirer, (2) les évaluer pour se concentrer sur celles qui sont les plus à mêmes de créer de la valeur et (3) mettre en place un dispositif qui les accueille et les développe en prenant en compte leurs spécificités. Il y a beaucoup à dire sur chacun de ces trois axes et ce sera le sujet d’une prochaine chronique. Les Achats quant à eux doivent bien définir leur périmètre d’action entre les Métiers / Business Units et le département Innovation. A minima, il s’agit de faciliter les échanges en offrant un cadre contractuel qui autorise la réalisation rapide d’expérimentations (des « proofs of concept » ou POCs) sans repousser les startups. Ils peuvent proposer une méthode d’évaluation appropriée. Les spécificités des startups vues plus haut le justifient largement. Les Achats peuvent aussi capitaliser sur les expérimentations réalisées au sein d’un groupe en centralisant et mettant à disposition l’information qui les concernent. Au-delà, les Achats peuvent avoir un rôle moteur dans le sourcing de startups. Cela suppose toutefois de la part des acheteurs une compréhension intime des besoins en innovation de l’entreprise et une intuition « business » pour repérer des opportunités à proposer aux Métiers.
C’est dire que les Achats peuvent jouer un rôle important dans la danse de Goliath et du Petit Poucet. Comme toujours, à eux de définir son étendue.